L’hôtellerie de luxe s’interroge depuis quelques temps déjà. Que doit-elle faire pour séduire ces nouveaux clients riches venus de tous horizons et de plus en plus exigeants ?
Le milieu s’affronte avec des endroits insolites, des spas plus luxueux les uns que les autres, une poignée de décorateurs qui imposent leur style tellement identifiable à la planète luxe.
Il est temps de changer de Galaxie.
Et si le vrai chic et le vrai Luxe étaient la discrétion, l’échange, le dialogue ? On pourrait même envisager de bousculer les rapports clients-hôteliers.
On ne viendrait plus dans un hôtel pour être uniquement servi aux standards internationaux, mais pour savourer un moment d’intimité, voire même de complicité partagée.
Quand la Toscane s’invite dans le Lubéron.
C’est le miracle que réussit chaque jour Bérangère Guénant dans la Villa Baulieu à Rognes en Provence. La jeune propriétaire de ce lieu hors du temps, discret et raffiné, propose non pas un service hôtelier stylé et désincarné, mais une invitation à la table d’une famille d’esthètes.
Ici, les œuvres d’Art contemporain côtoient en parfaite harmonie de précieuses antiquités. Quelques antiques dans le jardin tutoient des fontaines, l’Art de vivre à la française dans un jardin tout méditerranéen.
C’est dans cette demeure familiale qui n’est pas sans rappeler en dimension plus modeste le manoir de la série britannique Downton Abbey, que l’on s’abandonne au meilleur du beau, de l’élégance, avec la nonchalance de circonstance et un certain flegme, pour en apprécier tous les bienfaits.
Si la demeure est «absente» des guides et des parcours, c’est bien voulu.
Et c’est tant mieux, car ici la discrétion est le mot d’ordre, nous ne sommes ni à Saint Tropez ni à Monaco, mais dans les environs d’Aix en Provence. Ici pas de routards, encore moins de balcon sur le circuit.
Rien de l’imposante bâtisse n’est visible depuis la route, c’est une adresse que l’on se murmure. Dans une époque aussi clinquante que la notre, il est parfois rassurant de sentir planer l’ombre de Marcel Proust ou de Boni de Castelane dans des lieux séculaires qui en ont vu passer bien d’autres.
Si la demeure a été rénovée avec subtilité et authenticité, elle appartient cependant bien à notre époque, les onze chambres disposant des technologies les plus à la pointe pour rendre votre séjour pas tout à fait déconnecté.
Un spa et un jacuzzi ont été étonnamment perchés en haut de la plus haute tour qui domine la vallée, offrant un panorama ultime et toutes les Raiponces aux esthètes qui se seront posés les bonnes questions.
Mais le charme du lieu n’est pas que dicté par le bâti. Cet endroit qui a traversé les âges en vocation de maison de famille, transpire des âmes de ses prestigieux propriétaires, dont les chambres portent encore leur nom aujourd’hui. Ainsi, dans cette propriété des comtes de Provence, vous pourrez sentir la présence des plus grandes familles provençales : les Alamanon, Agoult, Oraison, Pontleroy mais aussi les Tournefort et les Candolle qui y ont résidé, et on été très attentifs à préserver ce terroir exceptionnel.
La restauration assurée par la propriétaire des lieux elle-même secondée d’un majordome, sert de théâtre aux vins de la propriété.
Car la Villa Baulieu est par ailleurs le plus grand domaine de l’Appellation Coteaux d’Aix en Provence.
Michel Fabre grand voyageur du terroir passé entre autre par l’Amérique du Sud, est la troisième génération d’une lignée de vigneron. Il crée des parcours œnologiques initiatiques et de découverte. L’histoire ne dit pas si la toute-en-élégance Cuvée Alexandre qu’il a créé lui a été insufflé par quelque pérégrination en Russie !
Les livres sont omniprésents dans la maison, des fois que vous prenne une soudaine envie de vous instruire.
Des fois aussi que le romantisme des chambres, le bon goût de cette piscine qui a laissé au ciel la couleur bleu azur, ou encore le charme du domaine n’opèrent pas sur vous…
Ou plutôt si malgré toutes les voluptés déployées par la Villa Baulieu, votre soirée ne prend pas le chemin d’un souvenir irrésistiblement frivole, vous trouverez bien un roman noir. Ou un bon vieux Stendhal si, comme Julien Sorel, vous êtes victime d’un certain Marquis de la Mole.
La Villa Baulieu est une Mansion… ni château ni maison, et encore moins villa, terminologie un rien petit bourgeois qui ne rend pas grâce au lieu. Elle est une demeure habitée, elle est un domaine, elle est une certaine idée du recevoir et de l’Art d’en vivre.
Demeure de famille 5 étoiles, elle représente l’idée du bien recevoir selon la famille Guénant ses propriétaires, dans une simplicité toute relative, avec élégance, chaleur et sans chichis. Serait-ce donc la bonne recette de l’avenir de l’hôtellerie de luxe ?
La Villa Baulieu est pour l’heure une exception et une adresse qui se mérite ; si vous avez été sensible à ces lignes, c’est qu’elle vous mérite aussi.
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