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(RE)POST

 

Mais qui a eu la peau du piano ?

  • Photo du rédacteur: Patrice Snoeck
    Patrice Snoeck
  • 30 oct.
  • 4 min de lecture

Dernière mise à jour : 31 oct.

HORS SERIE SPECIAL HALLOWEEN


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Tiens, tiens… mais d’où vient le son ?

En gare de Strasbourg, la majestueuse verrière et sa fabuleuse acoustique est le théâtre, bien malgré elle, de divagations sonores d’amateurs plus ou moins versés dans les gammes et qui pensent bénéficier là de l’effet cathédrale qui étouffera les lacunes de leur art.


Planté là comme un totem de la relation client, LE PIANO, cet instrument qu’on peut martyriser à la place du personnel ferroviaire sans risquer de se retrouver devant un tribunal, et la plupart du temps pas devant une tribune non plus.


Combien de Maestros pour un florilège d’arthrites, de pucelles qui ne sortiront pas de Do‑Ré‑Mi, qu’avaient sans doute anticipé les initiateurs de cette fabuleuse idée qu’est Piano en gare  ?

S’imaginaient-ils qu’elle serait la première vitrine positive du train sur TikTok et un sacré tremplin pour des musiciens à dextérité variée mais au répertoire plutôt créatif, à qui l’on offre un public en nombre et la plupart du temps choisi, pour peu qu’ils s’attardent ?


Mais au fait, il est passé où, le piano en gare de Strasbourg ?


L’instrument, qui s’offre aux artistes accomplis du jeu glissant, n’a eu de cesse de glisser au point que j’ai cru un instant que le sol n’était pas droit — ce ne serait pas la première malfaçon.

Situé auparavant sous le fameux escalier de l’Empereur, excroissance de façade qui passe inaperçue aux yeux du public qui le prend pour une sortie de secours, et sans doute mis là pour accompagner d’une fugue une possible évacuation d’urgence comme sur le Titanic, il n’a eu de cesse de couler vers tribord pour échouer dans le sud de l’aile Sud, sous les fenêtres de ce qui fut autrefois l’appartement du chef de gare et qu’il a lui aussi fui avec le Troisième Reich.


Abandonné des regards là où la verrière Zeppelin se rétrécit, en espérant ne pas offrir aux derniers aficionados de Wagner le sort des passagers du Hindenburg, il est calé dans les courants d’air comme pour théâtraliser le prélude de Debussy « Le vent dans la plaine », voire la pièce de Ravel « Jeux d’eau », les jours de pluie.


Le soir, des rhapsodies sans H mais très chiches prennent le relais, par un public interlope qui semble s’être donné rendez‑vous là, entre le dernier train et le passage de la SUGE peu avant la fermeture de la gare.

Et formidablement, la magie sociale s’accomplit, car même des mecs avec un sacré genre de dealer savent pianoter trois accords de Orelsan — et d'ailleurs, il y en a rarement plus.


Cela forme un étrange contraste avec la musique d’orgue et la musique souvent sacrée, diffusée devant la gare comme on le fait dans les parkings pour apaiser les craintes des derniers usagers, qui préfèrent croire entendre un accord Do‑Ré plutôt que le bruit des pas cadencés sur le sol de quelques amateurs de Toccata… mais avec Fugue. Et bien sûr, sans la BAC.













Mais cela ne répond pas à notre interrogation : pourquoi l’avoir déplacé dans cet endroit qui fait si peu honneur à Piano en Gare, nonobstant l’exposer à un déménagement express de nos bijoux de la couronne à nous, vu qu’il suffirait de piquer un tire‑pale sur le chantier du siège du Crédit agricole juste en face, même sans piquer le tabouret ?


Pour comprendre, il n’y a qu’à regarder qui occupe les étages supérieurs de la gare, où se situent les locaux de l’unité opérationnelle des roulants, à savoir l’établissement Grand Est qui englobe contrôleurs et management de ligne, et quelques conducteurs qui ont vu de la lumière et sont trop contents d’échapper à leur local à eux, coincé entre deux voies de service avec une machine à café lyophilisé, à vous ferait passer un Algeco pour une tiny house.


Serait-ce donc la faute aux occupants des deux étages du bâtiment séculaire qui, avant d’être coiffé de son Zeppelin qui met en scène sa spectaculaire façade, avaient pignon sur rue ?

Ou bien la nature hautement dépressive d’être à ce point déprécié d’un répertoire musical allant du medley pop à la musique de Hans Zimmer qui, une fois sur deux, aurait mieux fait de rester dans sa chambre ?


Et je ne parle pas du sabotage de la Lettre à Élise, justement sous les fenêtres d’une Élise qui attendait avec impatience sa mutation, et qui n’a pas rendu sourd que Beethoven…

à moins que ce ne soit l’évocation de l’œuvre elle-même, Bagatelle N°25 en La mineur pour piano solo, qui a fait craindre à Gare & Connexions quelques embrouilles avec la Police des mœurs…


Ainsi, Dance Monkey, qui parle de la pression de devoir faire tous les jours le même spectacle, a dû heurter plus d’un cheminot.

Et que dire d’Interstellar, qui déjoue la valeur du temps comme dans une mauvaise interprétation du roulement du TER 200…


Impossible aussi de jouer Halo de Beyoncé dans un espace aussi réduit, empêchant toute tentative de flashmob de leg-in panthère et battements de faux cils, et pourtant ce n’est pas les candidates qui manquaient…


Quant à la commande du personnel, qui s’arrache les cheveux pour marier des contrôleurs avec des conducteurs, qui sont autant Tristan et Isolde que Roméo et Juliette, elle n’en pouvait plus d’entendre des histoires d’amours impossibles, des liaisons contrariées par les plannings, des romances avortées à cause d’un changement de service, sans oublier les liaisons qui déraillent directement sur les quais !


Je milite pour le retour en grâce du piano, au centre de la gare qui a accueilli Clémenceau et Poincaré, un point c’est tout !


Elle a aussi accueilli Buffalo Bill en 1890 et finira sans doute par accueillir un Buffalo Grill… et bien sûr le Kaiser, et qui sait, un jour, la Maison Kayser.


C’est l’époque qui veut ça, mais la musique reste un lien social fort et est connue pour habiller les espaces, apaiser les mœurs et rapprocher les bords.


D’ailleurs, ce même Clémenceau ne disait-il pas que la musique était une forme de résistance à la médiocrité et au conformisme ?

C’est d’actualité.

L'Alchimiste #TTT, le contrôleur qui savait jouer Gros quick sur son Bontempi.

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À PROPOS

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Un pro de la communication basé à Strasbourg qui fait un tour de l'autre côté du miroir.

 

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